J'aurais aimé ne pas me souvenir de Claude Allègre.


Claude Allègre, Ministre de l'éducation nationale.


Je sais, le titre est un peu rude ! 

Ce blog est habituellement destiné à inscrire des moments ou des événements qui m'ont marqué. Et plus souvent encore, il propose des portraits sensibles de personnes : promoteurs d'itinéraires culturels, scientifiques, spécialistes de l'architecture ou du patrimoine, ou encore, des créateurs dont la rencontre physique ou intellectuelle a vraiment compté.

Mais il faut parfois faire des exceptions.

En particulier quand la détestation a été trop grande, en intervenant de surcroit sur le cours de ma vie.

Sans confidences intimes. Mais avec des confidences professionnelles.

Le post que j'ai consacré, il y a quelques mois, à me remémorer mon parcours professionnel, me tenait à coeur. Tout d'abord par la diversité d'activités dont il me semblait devoir témoigner, mais aussi par plaisir de défier wikipédia sur son terrain, à un moment où je dispose de tout l'espace et du recul pour écrire de manière justifiée : "Je me souviens". 

Mais je n'y ai pas inscrit certaines des raisons - et des difficultés personnelles inhérentes - qui m'ont permis de bifurquer à plusieurs reprises : des sciences du vivant vers l'art textile ou de la mise en place d'expositions en France ou en Inde, à la structuration et à la promotion d'un programme européen majeur, celui des Itinéraires culturels du Conseil de l'Europe, puis au suivi évaluatif de sites destinés à recevoir le label du patrimoine européen.



Claude Allègre le 2 novembre 2005 ©Getty - Frederic SOULOY


La disparition de Claude Allègre en janvier dernier a provoqué chez moi l'émergence d'un très mauvais souvenir et a ravivé le portrait d'un collègue d'université, devenu ministre de l'éducation et de la recherche. 

Un homme de gauche, affilié au Parti Socialiste, supposé rationnel dans ses recherches scientifiques en géologie, recherches avérées et récompensées, mais dont l'ambition aveugle l'a amené à des choix politiques opportunistes vers la droite, qui ne font qu'accroître ma colère renaissante. 

France inter lui a consacré en janvier quelques minutes d'un portrait incisif. 

La disparition d'un climatosceptique, salué par le Premier Ministre français comme un "esprit original" imaginatif, mais parfois à contre-courant, ne pouvait que tracer pour moi le portrait en contrepoint d'un autre chercheur qui a douloureusement brouillé les pistes du combat contre la pandémie du Covid : Didier Raoult.  

Des savants ignorants ? Quel paradoxe ! Mais surtout quel gâchis pour une société à laquelle on a lentement laissé penser que les scientifiques étaient inutiles, ne méritaient pas les crédits dont ils "bénéficiaient" et ne constituaient le plus souvent que des lanceurs d'alerte mettant en péril le progrès économique.

Ce message est même devenu une devise dans les "discours" d'un des hommes les plus puissant du monde : le Président des USA. 

Mais revenons un instant au Ministre de l'Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie qu'il a été à partir de juin 1997.

Une grande proximité avec le Premier Ministre de l'époque, Lionel Jospin, l'avait amené à ces responsabilités.

Je cite la fiche wikipédia

"C'est dans ce contexte que le 24 juin 1997, il prononce la phrase devenue célèbre « Il faut dégraisser le mammouth », qui devient l'emblème du conflit avec les enseignants. Selon l'Humanité, les chiffres qu'il annonce en septembre 1997 sur le taux d'absentéisme des enseignants (12 %) sont nettement supérieurs à la réalité (entre 5 et 8 %). En plus de leurs revendications, les syndicats dénoncent de manière récurrente les paroles prononcées et le choix des termes. Il déclare par exemple : « les enseignants ont quatre mois de vacances et, en plus, ils prennent leurs congés formation sur la scolarité ». De plus, un certain nombre de ses décisions passent pour autoritaires. Cela ne l'empêche pas de réformer la gestion du personnel enseignant et de réduire la rémunération des heures supplémentaires des professeurs."

Que dire de plus ? Sinon que c'est de 1997 à 1999 que j'ai vainement tenté de me faire détacher de la Faculté des Sciences de Paris vers le Grand-Duché de Luxembourg où j'exerçais les fonctions de Directeur de l'Institut européen des Itinéraires culturels

Un détachement qui aurait prolongé celui dont j'avais bénéficié pour exercer mes fonctions de conseiller de programme au Conseil de l'Europe, à Strasbourg de 1992 à 1996.

Mais à ses yeux, je devais certainement faire partie de ces enseignants-chercheurs qui abusaient des "loisirs". 

J'ai donc fini par démissionner en 1999 de l'administration française, après avoir pendant plus de deux ans partagé mes semaines entre Paris et Luxembourg, en tant que Directeur bénévole, assumant financièrement mes frais de transport et de séjour pour faire vivre un programme qui fêtera ses quarante ans en 2027.



Vue de Luxembourg ville. 2006. Cliché MTP.


Bien m'en a pris ! Je ne regrette rien ! Et je remercie la Ministre Erna Hennicot-Schoepges qui a compris qu'il fallait tout d'abord me rémunérer comme consultant, avant d'intégrer ce budget à la subvention de l'Institut, dont je suis alors devenu le salarié.

On me pardonnera je l'espère ce message personnel.

Encore une fois, je ne regrette rien !

Mais à un moment où les climatosceptiques se renforcent en France, s'adossant à des hésitations ministérielles, des reculs parlementaires et à la diffusion de contre-vérités, on devrait choisir la présentation pédagogique des prises de position de cet ancien ministre, comme sujet d'analyse sur ce que l'on nomme depuis quelques années : la "vérité alternative", ou la "post-vérité".  

Monsieur Allègre ne mérite que la postérité de devenir un cas d'école.

C'est le seul souvenir qu'il peut susciter !   

Une dernière citation cependant extraite de la notice wikipédia :

« C’est une imposture de prétendre qu’on peut prévoir le climat du globe dans un siècle et que cette augmentation serait apocalyptique pour le monde. [c’est une imposture] d’affirmer, au nom de la science, qu’il y aurait un lien dominant entre les dégagements d’origine anthropique du CO2 et le climat. [C’est] une imposture de la part des partis politiques verts de s’emparer de cette affirmation pour tenter de désorganiser notre société. »

On en jugera !

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